News Numéro courant Sondage: résultats Recherche Archives Deutsch English Русский עברית Español


Sommaire Pessah 5756 Printemps 1996 - Pessah 5756

Éditorial - Avril 1996
    • Éditorial

Pessah 5756
    • Une fabuleuse leçon d'espoir

Interview Exclusive
    • Israel à la croisée des chemins

Terrorisme
    • Accords d'Oslo - Sang et Larmes

Politique
    • Des attentats - des élections

Analyse
    • Le point de vue de S.E.M. Meïr Rosenne
    • Les Juifs dans la nouvelle Afrique du Sud
    • Recette pour un désastre

Judée - Samarie - Gaza
    • Hébron - Berceau du peuple juif

Art et Culture
    • Montmartre vivant - De Toulouse Lautrec à Utrillo
    • 3000 ans d'histoire

Reportage
    • Vivre la mémoire
    • La continuité dans le changement
    • L'Aleph Institute

Portrait
    • Mazal UBeraha

Médecine
    • La main sur le coeur

Économie
    • Electric fuel

Éthique et Judaïsme
    • Délits d'initiés

Envoyer par e-mail...
Une fabuleuse leçon d'espoir

Par le rabbin Zalman I. Posner *
Nous connaissons tous très bien l'histoire de Pessah, cette épopée dramatique que nous répétons d'année en année. De séder en séder, nous y découvrons de nouvelles interprétations, de nouvelles nuances, voire de nouvelles leçons de vie. L'histoire peut être résumée en ces quelques têtes de chapitres, tous aussi intenses que riches en événements: le buisson ardent - les refus de Pharaon de libérer les Israélites - le retour de Moïse en Egypte et sa rencontre avec les souffrances de SON peuple - les dix plaies et finalement la libération !

Deux petites phrases de ce récit attirent notre attention aujourd'hui: dans un premier temps, nous apprenons que lors de la première rencontre entre Moïse et les Enfants d'Israël, il est dit: "... et le peuple eut foi...". Un peu plus loin, nous constatons que lors de la seconde entrevue de Moïse avec les Israélites, ceux-ci ne pouvaient pas l'écouter "car ils étaient écrasés par la dureté du labeur".

Une question simple nous vient immédiatement à l'esprit. Pour quelle raison les Enfants d'Israël, qui avaient bien compris le message de Moïse lors de la première rencontre, ne furent-ils pas à même de l'entendre une seconde fois ?

Entre la première et la deuxième rencontre, Moïse avait été reçu par Pharaon à qui il avait demandé de libérer les Hébreux. Non seulement celui-ci avait refusé, mais il avait durci les conditions de travail des esclaves juifs: "... qu'il y ait donc surcharge de travail pour eux et qu'ils y soient astreints..." (Exode VI-9). Cette contrainte supplémentaire entraîna un changement d'attitude radical des Hébreux, qui s'explique de la manière suivante: un esclave qui peut encore rêver de liberté n'est pas totalement soumis à l'esclavage, car une partie de son âme n'a pas été touchée par son tortionnaire et maître. Lors de la première rencontre avec Moïse, les Enfants d'Israël se souvenaient encore des promesses de leurs pères, du pacte que D' avait conclu avec Abraham et de tout ce patrimoine spirituel et d'espoir qui leur avait été transmis de générations en générations. Certes ils étaient en esclavage, mais leur esprit était libre. Lors de la seconde visite de Moïse, en raison des nouvelles conditions de travail imposées par Pharaon, ils n'avaient plus le temps ni de penser ni de réfléchir. Ils étaient devenus des esclaves à part entière, totalement désespérés, poussés à bout au point de ne plus être à même d'entendre des paroles évoquant la liberté.

Une brève analyse du pacte conclu entre D' et Abraham nous apprend que le but final de cet accord était l'établissement de la nation juive, la nation de la Torah, la nation des valeurs morales et des éthiques fondamentales qui régissent l'humanité. Mais cette alliance prévoyait aussi que cette nation ne verrait pas le jour "d'un coup de baguette magique". Les Juifs devraient mériter de devenir ce peuple élu et, pour ce faire, passer par l'esclavage et l'exil. Abraham accepta cette clause du pacte qu'il conclut avec D'.

Mais pourquoi l'esclavage et l'exil jouent-ils un rôle si important ?

Les Juifs n'ont jamais eu le monopole de la foi. A cet égard, il est intéressant de rappeler les termes du roi Salomon lors de l'inauguration du premier Temple de Jérusalem (Rois I VIII-41-43) "... je t'implore aussi pour l'étranger qui ne fait pas partie de ton peuple Israël et qui viendrait de loin pour honorer ton nom. ..., et ils viendront prier dans cette maison, toi, tu l'entendras du ciel, ton auguste résidence, et tu exauceras les výux que t'adressera l'étranger...". Ce texte nous enseigne que D' écoute les pieux parmi les nations qui le reconnaissent. Mais quelle différence existe-t-il entre eux et les Enfants d'Israël ?

Le monde écoute et accepte un D' qui répond à ses prières. Les Juifs, la nation de la Torah telle qu'Abraham l'avait conçue, ont une foi inébranlable en D'. Ceci devrait être vrai même lorsque les Juifs ont l'impression de ne pas être entendus par Lui. Ce fut certainement le cas pour Abraham, mais pouvons-nous en dire autant aujourd'hui ? Ne serions-nous pas plutôt tentés d'abandonner toute relation avec D', toute forme de croyance et de prière lorsque nous pensons qu'en fait D' nous a abandonnés et que nous ne percevons pas la réponse divine ?

L'exil et l'esclavage furent des épreuves terribles au cours desquelles les Enfants d'Israël durent se montrer à la hauteur afin de pouvoir devenir cette nation de la Torah que D' avait promise à Abraham. Malgré la dureté des épreuves et du temps, ils n'abandonnèrent jamais leur foi en D'. Ce n'est qu'au moment où ils avaient abandonné tout espoir et tout rêve de liberté, quand ils étaient au plus bas de l'échelle, que D' dit à Moïse de s'adresser à eux car, dès cet instant, ils étaient prêts à vivre la liberté et à l'apprécier à sa juste valeur.

Cette leçon nous enseigne qu'un Juif n'a jamais le droit de perdre espoir ou d'être désespéré. Nous répétons d'année en année l'histoire de la sortie d'Egypte pour nous souvenir que c'est lorsque nous étions au plus fort du découragement que D' est venu à notre secours et nous a apporté le salut et la liberté.

Chaque génération a son "Egypte"; sous la forme de la barbarie nazie, sous celle de l'esclavage sous le joug soviétique, et partout où elle s'exprime par un antisémitisme actif dont est truffée l'histoire de l'humanité. Mais il existe d'autres formes d'exils, celles qui sont en nous tels, par exemple, certains ghettos dorés dans lesquels nous sommes parfaitement à l'aise mais qui, en réalité, constituent un risque pour notre survie spirituelle. D'autres dangers nous guettent, et je crains fort que ceux-ci ne mettent notre avenir en péril. Je pense notamment à l'exclusion de Juifs par d'autres Juifs. Il s'agit là de l'indifférence totale vis à vis de certains de nos coreligionnaires face à leurs souffrances et surtout face aux dangers auxquels ils sont exposés. Une ligne de démarcation est souvent tracée entre Juifs. Aujourd'hui, il s'agit d'une ligne verte; le Juif qui vit du bon côté de la "ligne verte" est digne de considération, alors que celui qui habite de l'autre côté de cette fameuse ligne est déconsidéré, voire ignoré. Il en va de même de cette séparation invisible et détestable qui sépare les Juifs pieux des Juifs non religieux. De part et d'autre, l'exclusion constitue une forme de ghetto que nous nous imposons à l'intérieur même de notre peuple.

Les esclavagistes ont toujours su tirer profit du fait d'entretenir la mésentente parmi les esclaves, leur union constituant la clé vers la liberté.

Aujourd'hui, c'est à nous de savoir nous débarrasser des jougs invisibles qui nous oppressent, de sortir et de mettre fin aux exils et aux ghettos qui existent dans notre société et qui mettent notre avenir en danger. Je pense que c'est là l'un des grands messages que nous apporte la lecture de la Haggadah en ce Pessah de l'an 5756. Sachons le comprendre et agissons !

Contacts
Redaction: edition@shalom-magazine.com   |  Advertising: advert@shalom-magazine.com
Webmaster: webmaster@shalom-magazine.com

© S.A. 2004