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Sommaire Vatican Automne 2003 - Tishri 5764

Éditorial - Septembre 2003
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Le Saint-Siège et Israël

Par le Dr Sergio Itzhak Minerbio
Pendant des dizaines d’années, le Saint-Siège n’a pas eu de relations diplomatiques formelles avec l’État d’Israël, malgré quelques contacts entre les papes et certains premiers ministres ou ministres israéliens. La voie pour la reconnaissance formelle d’Israël de la part du Saint-Siège a soigneusement suivi le chemin parallèle parcouru par l’Olp, bien qu’une première prise de position du Saint- Siège se soit déjà manifestée en janvier 1991, après la Guerre du Golfe.

Suite à la Conférence de Madrid en octobre 1991 au cours de laquelle une délégation de l’Olp (intégrée dans une formation jordano-palestinienne) siégea face à celle d’Israël, le Saint-Siège accepta quelques mois après, le 29 juillet 1992, d’entamer des négociations avec Israël pour l’établissement éventuel des relations diplomatiques. Mais il a fallu attendre les Accords d’Oslo et surtout la rencontre à Washington entre le Premier ministre israélien Itzhak Rabin et le chef de l’Olp, Yasser Arafat, à la Maison Blanche le 13 septembre 1993, pour ouvrir la route à la signature de l’Accord Fondamental entre le Saint-Siège et Israël, ratifié à Jérusalem le 30 décembre 1993. Enfin, ce n’est qu’après l’accord du Caire avec l’Olp que le Saint-Siège accepta, en juin 1994, l’échange d’ambassadeurs, celui du Vatican ayant le titre de Nonce Apostolique. Ensuite, l’Accord sur la personnalité juridique [de l’Église] fut signé le 10 novembre 1997, tandis que l’Accord sur les questions fiscales et économiques n’a pas encore été signé. A mon avis, l’Accord Fondamental devrait être complété par un article reconnaissant à Israël le droit d’approuver la nomination des évêques, puisqu’il y a déjà eu un cas dans lequel l’Église a nommé un évêque, nonobstant le fait qu’il soit persona non grata en Israël.
Ce préambule explique que ce qui compte avant tout pour le Saint-Siège, c’est de sauvegarder les bonnes relations avec les États arabes.
Au cours de la dernière crise entre le Saint-Siège et les États-Unis à propos du projet américain d’attaquer l’Irak, on a beaucoup parlé du fort courant pro Arabe soutenu au Vatican par deux personnalités de haut niveau dans la hiérarchie vaticane. Il s’agit de Mgr Jean-Louis Tauran, secrétaire pour les Relations avec les États (équivalent à un ministre des Affaires étrangères) et de Mgr Renato Martino, observateur permanent auprès des Nations Unies à New York et devenu depuis le président du Conseil Pontifical Justitia et Pax.
La question de Jérusalem et de son statut est celle qui divise le plus le Saint-Siège et Israël. Déjà en 1984, le pape Jean Paul II disait dans sa lettre Apostolique «Redemptionis Anno» que le Saint- Siège désirait «qu’il soit accordé à Jérusalem un statut spécial garanti internationalement. Il faudrait créer une entité supranationale et internationale pourvue des moyens adéquats pour assurer la préservation des caractéristiques spéciales de la ville». Le Pape avait souhaité en janvier 1996 que la ville «préserve son unicité»; les Lieux saints «perdraient beaucoup de leur signification s’ils n’étaient en permanence entourés par des communautés actives pouvant jouir d’une véritable liberté de conscience et de religion.» Le 25 octobre 1998, Mgr Jean-Louis Tauran vint expressément à Jérusalem pour définir les désirs du Saint-Siège sur le statut de la ville. La situation actuelle lui semblait «un cas de manifeste injustice internationale» obtenu et maintenu par la force [d’Israël]. Il répéta la demande du Saint-Siège, à savoir que Jérusalem soit protégée par un «statut spécial internationalement garanti», que soient préservées les caractéristiques historiques et matérielles de la ville, et que l’égalité des droits pour les communautés appartenant aux trois religions soit sauvegardée, car le caractère sacré de toute la ville de Jérusalem rend l’extraterritorialité des Lieux saints insuffisante. Tauran ajouta: «Jérusalem-Est est illégalement occupée. Il n’est pas correct de dire que le Saint- Siège soit seulement intéressé par les aspects religieux de la ville et qu’il survole les aspects politiques et territoriaux. Les deux sont strictement liés.» Selon Tauran, ces communautés actives de Juifs, Chrétiens et Musulmans devraient jouir de la liberté de conscience et de religion et de l’accès aux Lieux saints, tout en garantissant le caractère sacré et l’héritage culturel universel de la ville. Le libre accès devrait être assuré à tous, à la population locale ainsi qu’aux pèlerins.
En octobre 1999, le Gouvernement israélien autorisa la construction d’une mosquée à Nazareth sur la place devant la Basilique de l’Annonciation, et en novembre il y eut la pose de la première pierre. Immédiatement Sa Béatitude le patriarche Latin de Jérusalem, Michel Sabagh, ferma la Basilique du Saint Sépulcre à Jérusalem pour deux jours et déclara qu’Israël voulait «fomenter la tension entre Chrétiens et Musulmans». Cette même déclaration fut répétée le lendemain par le porte-parole du Vatican, Joaquin Navarro-Valls. Celui-ci loua les efforts du Mouvement Islamique et blâma Israël pour le regain de la tension. Quelques années après, la décision fut renversée par les Tribunaux et en 2003, le Gouvernement israélien fit détruire les quelques murs déjà bâtis de cette mosquée. Le Vatican remporta ainsi la victoire après avoir employé les termes les plus acerbes et virulents dans une polémique qu’il aurait pu éviter.
A l’occasion des fêtes du Jubilé, le pape Jean Paul II décida de visiter la Terre sainte. A la veille de son départ le 15 février 2000, le Saint-Siège signa un accord avec l’Olp et le Pape reçut Yasser Arafat. Selon le Pape, les bergers venus à Bethlehem il y a deux mille ans étaient des palestiniens. Dans le texte de l’accord, on parle de Jérusalem et on affirme que «les décisions unilatérales et les actions qui changent le caractère spécifique et le statut de Jérusalem sont moralement et légalement inacceptables ». Naturellement, le sous-entendu ici est l’annexion par Israël de Jérusalem-Est et la «judéisation » de la ville, maintes fois condamnées par les Arabes et le Vatican. Le Vatican demande un «statut spécial internationalement garanti, qui sauvegarde la liberté de religion et de conscience pour tous». Ainsi, la question de Jérusalem, dont le Saint-Siège n’avait pas voulu traiter avec Israël en la définissant comme une question multilatérale, est devenue bilatérale face à l’Olp. La réaction du Gouvernement israélien fut immédiate: «Jérusalem est et restera la capitale d’Israël et aucune déclaration ne pourra changer cette réalité». Israël manifesta aussi son regret face à une grave ingérence dans la négociation entre Israël et les palestiniens, le Vatican ne soutenant que l’une des deux parties. En mars 2000, le Pape accomplit une visite officielle de quatre jours en Israël, où il fut accueilli à l’aéroport par le président de l’État Ezer Weizmann et le Premier ministre Ehud Barak, avant de se rendre chez le Président, les Grands rabbins et à Yad Vachem. Cette visite est certainement historique, mais il y eut aussi des ombres: le Pape lia la Passion de Jésus à celle des palestiniens, parla des préjugés antichrétiens des Juifs et définit l’extermination d’un peuple [Juif] entier comme le résultat d’une idéologie «sans D’». Enfin, il mit un écrit dans le Mur des Lamentations qui, tout en étant identique à celui du 12 mars 2000, était dépourvu du préambule liant ce texte aux Juifs. Cette position de partialité arriva à son apogée en avril 2002 lors de l’occupation de la Basilique de la Nativité à Bethlehem par des palestiniens armés qui y étaient entrés par la force. Pendant 39 jours, l’armée israélienne maintint un siège à la Basilique et, pendant toute cette période, le Saint-Siège organisa une campagne internationale de haine, de propagande et de dénigrement contre Israël. Depuis l’intérieur de la Basilique, le père Ibrahim Faltas faisait de la propagande pro-palestinienne tandis qu’à Rome, le père David-Marie Jaeger parlait des prétendues violations israéliennes «de toute loi d’humanité et de civilisation». Dans le cas de la mosquée de Nazareth et de celui de la Basilique de la Nativité, le personnage qui enflamma le plus les relations entre Israël et le Saint-Siège fut Sa Béatitude le patriarche Latin de Jérusalem, Michel Sabagh, le premier palestinien à être nommé Patriarche de Jérusalem en 1987. Un exemple de son style et de ses idées est donné par son message de Pâques en avril 2003, dans lequel il dit: «Les voies suivies jusqu’à aujourd’hui ne sont pas celles de la paix, à savoir les actions militaires imposées à l’ensemble des villes et villages palestiniens qui en font des grandes prisons, où la dignité humaine est bafouée, où les attentats se multiplient et les démolitions des biens et des maisons continuent. (...) Depuis le siège de la Basilique de la Nativité il y a un an, rien n’a changé pour nous. La Basilique est libérée, mais pas la personne humaine: les palestiniens sont restés sous le siège, livrés aux humiliations, à la faim et à l’anarchie, et les Israéliens sont restés dans la peur et l’insécurité. (...) Traiter avec les peuples selon les exigences de la paix et de la justice est l’unique moyen d’éviter toute sorte de terrorisme.» D’une manière générale, le Pape a toujours évité les termes les plus durs et essayé de garder à propos du conflit arabo-israélien une attitude équidistante mais très souvent, il a nettement pris position en faveur des palestiniens contre Israël. Pour terminer, rappelons que le 2 juin 2003, en recevant le nouvel ambassadeur d’Israël auprès du Saint- Siège, le Pape a répété: «Aucune décision unilatérale ne peut être prise sur la définition du statut des Lieux saints à Jérusalem». Le Pape a également évoqué les problèmes territoriaux, des réfugiés palestiniens et des implantations israéliennes, toutes des questions fondamentales sur lesquelles la position du Vatican et celle d’Israël divergent.

Sergio Itzhak Minerbi, Docteur es Lettres de la Sorbonne, a publié plusieurs livres d’histoire dont: «L’Italie et la Palestine», PUF, Paris, 1970 et «The Vatican and Zionism», Oxford University Press, New York, 1990.


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