Éditorial
Par Roland S.Süssman - Rédacteur en chef
Chères lectrices, chers lecteurs,
«Souris - c’est grave !», chante le poète français Alain Chamfort. Cette phrase cerne parfaitement l’action du gouvernement Barak. Mais les sourires d’Ehoud Barak ne trompent personne. Il est pathétique et humiliant de voir le Premier ministre de l’État juif supplier Arafat de «bien vouloir accepter» des concessions israéliennes suicidaires et unilatérales en échange de la signature d’un accord que le terroriste n’a pas la moindre intention d’honorer. Tel un amoureux bafoué face à une femme indifférente, Barak appelle, dénonce, tonne, menace et flatte afin d’obtenir un traité qui mettra en péril notre avenir, et dont le seul mérite sera de permettre à Clinton, le président lubrique, de quitter la scène politique sur un semblant de succès.
Or à ce jour, rien n’y fait, Arafat reste intraitable, et rien ne peut y faire. Hosni Moubarak a clairement défini la position du monde arabe et islamique en disant: «Personne ne pardonnera à Arafat de faire des concessions sur Jérusalem.» Barak pourrait donc très bien faire preuve d’un minimum de fierté nationale et refuser de continuer de négocier tant que les Arabes ne tiennent pas leurs engagements. Mais ce serait exiger la réciprocité, idée inadmissible car prônée par Benjamin Netanyahou. Il pourrait aussi souligner l’importance pour nous, Juifs, de Jérusalem, symbole de notre identité et essence de nos prières, et retirer ce point des éléments négociables. Ce brin de fermeté permettrait sans aucun doute d’avancer dans la recherche d’une coexistence pacifique avec les Arabes, de promouvoir un essor économique commun et d’éviter l’évolution de la radicalisation des Arabes israéliens. Mais Ehoud Barak, dans sa fuite en avant, fait volontairement fi du fait qu’Arafat ne veut pas la paix, mais la destruction de l’État juif et la création d’un État palestinien en Israël.
Il est donc particulièrement difficile d’établir une évaluation de la situation, car chaque jour apporte de nouveaux éléments intéressants ou douloureux. Côté israélien, il faut constater que Ehoud Barak négocie seul, dans le plus grand secret. Le Premier ministre n’a pas de gouvernement représentatif, il n’a plus de majorité à la Knesset et sa crédibilité est tournée en ridicule. Ceci est d’autant plus inquiétant que n’importe quel accord, qu’il aura simplement parafé, engagera les futurs gouvernements d’Israël. Barak a promis aux Arabes de leur céder la vallée du Jourdain, région hautement stratégique pour Israël, et de donner à l’OLP toute la Vieille Ville de Jérusalem, sauf le Quartier juif et le Kotel Hamaaravi, lui garantissant également un statut d’exterritorialité sur le Mont du Temple et un couloir pour y accéder sans qu’aucune inspection de sécurité israélienne ne puisse y être effectuée. Il a proposé d’évacuer, au besoin manu militari, des familles juives de leurs foyers en Judée-Samarie-Gaza. Concernant Hébron, il a offert, à Camp David, d’en expulser les Juifs, ce qui rendrait le caveau des Patriarches, ce sanctuaire exclusivement juif et unique au monde..., Judenrein. Si toutes ces «nouvelles solutions créatives» ne sont pour l’instant que du verbiage tactique, elles sont dangereuses et irrévocables. Pour la première fois dans l’histoire, un Premier ministre israélien fait abstraction des droits exclusifs et inaliénables des Juifs sur la totalité de la terre d’Israël et accepte d’abandonner une partie de Jérusalem à une organisation terroriste antisémite. Pour les sceptiques qui veulent croire que l’OLP a changé, il suffit d’ouvrir un livre de géographie distribué dans les écoles des zones palestiniennes: sur la carte du Moyen-Orient, Israël ne figure pas. Cette même carte est reproduite sur des T-shirts que des étudiants arabes des universités israéliennes arborent avec fierté !
Pendant que Ehoud Barak joue les «anges de la paix», les problèmes graves du pays restent en souffrance, le chômage progresse et le fossé entre très riches et très pauvres continue de se creuser. L’animosité entre religieux et non religieux augmente et est exacerbée par une nouvelle idée de Barak qui a lancé sa «révolution laïque», programme destiné à piétiner toutes les traditions et les valeurs de la Torah qui donnent à Israël sa spécificité juive. Absurdité ou cynisme ?
Côté arabe, rien ne change. Pourquoi en serait-il autrement ? Plus le temps passe, plus Israël leur fait de concessions et persiste dans cet exercice périlleux qui consiste à porter aux nues leurs espoirs les plus fous. L’Égypte poursuit son combat diplomatique anti-israélien tout azimut, en particulier dans le cadre de l’ONU, là où Barak a reconnu, devant 150 chefs d’État, l’importance de Jérusalem… pour les palestiniens ! Ces derniers ont clairement fait savoir que «toute solution partielle implique la souveraineté palestinienne sur la Ville sainte, l’évacuation de tous les territoires dits «occupés», le droit du retour de tous les réfugiés arabes et la mise en place d’un État palestinien». Dans ces conditions, il est difficile de comprendre comment Ehoud Barak, pourtant bien conscient de ces éléments, peut imaginer obtenir un accord stipulant «la fin du conflit», qui mettrait aussi un terme à toutes les revendications arabes. Quant à la Syrie, sa presse gouvernementale vient de publier un nouvel article niant la Shoa et accusant Israël d’utiliser ce «mythe» pour exercer du chantage sur le monde arabe, fixant ainsi le ton pour une future négociation de paix.
Certes, Barak est applaudi pour son «courage», mais à chaque fois qu’Arafat rejette «le compromis américain», Israël est instamment prié de faire plus de concessions. Les Arabes, eux, n’en font pas et mènent leur combat à tous les niveaux. Alors qu’Israël fait preuve de compréhension à l’égard des sentiments des palestiniens pour Jérusalem, le mufti de la ville, Ikrima Sabri, nommé à ce poste par Arafat, a refusé de se rendre à la réunion des leaders spirituels de l’ONU parce que l’un des Grands Rabbins d’Israël, Rav Lau, y participait.
Que faut-il de plus aux Juifs qui défilent à Jérusalem sous la bannière «deux capitales – une seule ville» ?
Au moment où le peuple juif se trouve dans l’obligation de prendre des décisions qui engagent son avenir de façon cruciale, Israël, en raison des tactiques hasardeuses de son Premier ministre, est dans une situation inextricable. C’est l’occasion pour Ehoud Barak de faire preuve de son fameux «courage» en soumettant son action et ses plans au jugement des électeurs israéliens. Soit il obtient un mandat incontestable pour agir à sa guise et tout ce qu’il entreprendra aura la bénédiction du peuple et du parlement, soit il est renvoyé dans ses pénates…
En cette période de Nouvel An au cours de laquelle la nation juive se met en prière, tant dans la Jérusalem terrestre que dans la Jérusalem céleste, un message d’espoir exprimé par le prophète Isaïe (LIV-17) nous encourage: «Tout instrument forgé contre toi sera impuissant, toute langue qui se dressera contre toi sera convaincue d’injustice.»
Toute l’équipe de SHALOM vous souhaite une excellente année.

Roland S. Süssmann
Rédacteur en chef

Bonne année !